Faut-il avoir peur des robots-rédacteurs ?
- Le 16 mars 2017
Avez-vous déjà entendu parler des robots-rédacteurs ?
En tant que rédactrice, ce sujet m’a particulièrement interpellé. Le premier réflexe est de se dire, mon Dieu, de la concurrence déloyale ! Bon, autant dire que pour le moment, notre robot rédacteur n’est pas (encore) Terminator !
En effet, à y regarder de plus près, on peut découvrir tout autre chose.
1) Guide pratique du robot-rédacteur :
Voyons ce que sont ces nouveaux acteurs du rédactionnel. Qui sont-ils et comment fonctionnent-ils ?
a) Qui sont-ils et comment fonctionnent-t-il ?
Sur le Net, vous allez surtout les trouver sous le nom de « robots-journalistes ». A tort car ce sont (pour le moment) des robots-rédacteurs. En ce sens, ils n’ont pas la possibilité d’analyse et de réflexion des journalistes. Ils rédigent des textes assez simples à partir d’une base de données qui leur est fournie. Des linguistes paramètrent le programme qui permet de choisir le ton désiré du contenu rédactionnel, la longueur des textes etc. De ce fait, ils racontent des histoires à partir de données brutes grâce à un principe d’algorithmes.
Ce principe de « génération automatique de texte » ou GAT existe depuis longtemps.
Les premières recherches ont commencé après la seconde guerre mondiale puis se sont développées dans les années 60. En 1985, Laurence Danlos avait conçu un système de génération automatique des dépêches.
Dans les années 1990, la GAT est utilisée pour les prévisions météorologiques puis elle fait son apparition dans de nombreux secteurs comme dans celui de la rédaction de manuels d’utilisations, de fiches médicales etc.
Ces dernières années, la GAT a refait surface sur le devant de la scène médiatique. La raison en est qu’elle a commencé à être utilisée dans un secteur sensible : les rédactions presse. Ces dernières, déjà touchées économiquement par l’envol du numérique n’accueillent pas forcément bien l’idée de robots-journalistes.
b) Qui utilise les robots-rédacteurs ?
Les premières rédactions qui ont fait appel aux services des robots-rédacteurs sont américaines :
Depuis 2007, le Los Angeles Times leur fait rédiger des articles sur tous les crimes commis dans le comté de Los Angeles. Il s’agit du programme « Homicide Report ». La base de données rendant possible cette rédaction automatique provient des médecins légistes.
Depuis 2013, le magazine Forbes leur fait rédiger des articles sur le sport et la finance.
En France, l’arrivée des robots rédacteurs se fait en 2015, pour les élections régionales.
36 000 articles ont été à ce moment conçus pour Le Monde. Ils donnaient les résultats des élections pour chaque canton.
En dehors du secteur des médias, certaines entreprises font également appel à des robots-rédacteurs, dans l’e-commerce ou le tourisme par exemple.
Les textes sont rédigés à partir de leurs bases de données telles que des fiches techniques, des catalogues de produits etc.
On peut se demander qui propose les services de ces robots.
c) Qui les commercialise?
Il existe une douzaine d’entreprises dans le monde.
Aux Etats-Unis, deux sociétés principales vendent leurs services pour les médias :
- Automated Insights qui est partenaire de Associated Press.
- Narrative Science et son logiciel Quill qui équipe le magazine Forbes par exemple.
En France, il y a Syllabs et son outil Data2content.
2) Pourquoi faire appel aux services des robots-rédacteurs ?
Mais pourquoi faire appel à ces robots plutôt qu’à des humains me direz-vous?
a) Vers toujours plus de contenu :
L’importance du contenu rédactionnel sur le web n’est plus à prouver. Les robots-rédacteurs sont donc les alliés des rédacteurs web. Ils permettent de produire plus de contenu et plus vite. Ils optimisent des données brutes et libèrent les hommes des tâches rédactionnelles chronophages et répétitives. Aux rédacteurs en chair et en os incombe le travail d’analyse, de réflexion que ne peuvent (encore) faire ces robots.
Un meilleur référencement naturel :
Toute cette production de contenu rédactionnel permet aux sites web d’avoir un bon référencement naturel (SEO). Mais attention, il ne faut pas proposer n’importe quel contenu ! Il faut du contenu de qualité.
Or justement l’idée de ces robots-rédacteurs est de rendre du contenu inintéressant en contenu informatif agréable à lire.
Le site Data2content insiste sur la qualité « humaine » des textes produits. Les contenus ne sont pas dupliqués et sont optimisés SEO. D’ailleurs, des études ont montrés qu’on ne fait pas la différence entre des textes rédigés par des robots ou des humains. (1) Voyez par exemple les résultats des élections. Il est plus agréable de lire de vraies phrases que de déchiffrer un tableau. L’expérience client (UX) de l’internaute va être bien meilleure.
Le contenu rédactionnel est important pour qu’une entreprise soit bien référencée dans les moteurs de recherche. Mais il est aussi fondamental pour bien vendre car il permet de séduire l’internaute.
L’importance de devenir son propre média :
Pour faire la différence sur le net, les entreprises doivent de plus en plus produire du contenu de qualité, être expertes en leur domaine.
Les nouvelles stratégies d’Inbound marketing vont dans ce sens. L’entreprise doit faire venir le client à soi en produisant du contenu avisé sur toutes les plateformes éditoriales pertinentes. Elles sont leur propre média. Contenu rédactionnel et conseils ciblés, services gratuits téléchargeables, marketing relationnel, sont les clés de la réussite de ces nouvelles stratégies.
L’agence 1min30 spécialisée en Inbound marketing propose d’ailleurs les services de robots rédacteurs !
Quoi de mieux que de multiplier sur son site web la quantité de textes pertinents conçus à partir de données brutes ! Transformer ces dernières en de vraies phrases propose une valeur ajoutée. De surcroît, ces robots peuvent proposer du multilinguisme à la source, sans traduction.
b ) Un cas pratique :
Nous évoquions l’agence 1min30. Le groupe Guy Hoquet s’est associée à elle (et Syllabs) pour faire produire des contenus par des robots pour ses 450 agences immobilières françaises.
Face à la concurrence, l’idée est d’améliorer la relation client de Guy Hoquet en proposant de l’information immobilière locale et ciblée dans chacune de ses agences.
Chaque agence devient son propre média expert et local. L’audience locale ainsi ciblée et concernée peut devenir plus aisément un client.
Les robots travaillent à intéresser une audience qui peu à peu va constituer un fond de contacts de clients potentiels. Les agents de chaque agence peuvent désormais mieux se concentrer sur leur métier de la vente.
Bien entendu, dans l’idée, un rédacteur aurait pu être embauché dans chaque secteur. Mais il n’aurait pas été aussi productif.
L’usage des robots rédacteurs comporte donc beaucoup d’avantages et va se développer.
Les entreprises voudront exploiter des datas toujours de plus en plus nombreuses et ne pourront de ce fait se passer de leurs services.
c) Des limites :
Mais il faut relever certaines limites qui pour le moment freinent encore leur développement.
Les robots-rédacteurs ne peuvent (heureusement) pas encore se passer de l’humain.
Avant le lancement de la rédaction de milliers d’articles, il faut faire de nombreux tests. La phase de rodage est cruciale. Et surtout, ils ne peuvent pas rédiger avec une émotion bien humaine des commentaires, des critiques, des analyses.
Une autre limite, et de taille, est celle de la qualité des données fournies aux robots. Si elles ne sont pas sures tous les textes produits seront douteux.
Dans le cas de l’open data public par exemple, les données ne sont pas forcément mises à jour. Les administrations n’ont ni le temps ni les moyens de le faire. Elles sont donc difficilement exploitables.
Par ailleurs, la limite est juridique aussi. Il faut s’assurer qu’on a le droit d’utiliser des données, combien de temps, sur quels supports etc.
Voici autant de nouvelles questions qu’il va falloir se poser avant de généraliser l’usage des robots dans son entreprise. Si cela vous tente, étudiez les. Et surtout, n’oubliez pas l’importance des émotions humaines pour parler à vos clients et les convaincre. Les robots sont les alliés des rédacteurs. Vous ne devez pas vous passer des services de ces derniers !
(1) Sources : études en Suède de Clerwall , études aux Pays-Bas de Krahmer et van der Kaa
0 comments on Faut-il avoir peur des robots-rédacteurs ?